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Origine nom hameau Puy-de-dome, Auvergne

Questions-Réponses relatives à l'identification d'un lieu. N'oubliez pas que vous pouvez consulter la carte de Cassini.
micgail
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aviatge escribió: 22 Julio 2019, 23:36 Bonjour,

Puis-je me permettre d'en rajouter une couche ? :)
D'après Jacques Astor (Dictionnaire des noms de familles et noms de lieux du Midi de la France) une racine préceltique ker-v a donné dans certaines zones, dont le Massif central, des noms de croupes montagneuses (Cerveau, Cervel, Servel, ...) qui pourrait expliquer le premier élément de Serverand.
Pour le deuxième élément je vois plusieurs hypothèses.
- La racine ranc (ron dans la prononciation de l'auvergnat actuel), mot d'origine pré-indo-européenne, qui désigne un rocher, un rocher escarpé, avec des spécialisations de sens comme falaise. Cela pourrait qualifier ce « petit hameau isolé perché au bord d'un vallon » mais la photo aérienne ne permet pas de confirmer si cela correspond à la réalité.
- Le nom germanique Rand qui indiquerait le possesseur du site.
- La racine randa, terme celtique au sens de bord, limite. Cette hypothèse pourrait être confortée par le fait que le site est bordé par le ruisseau de la Palle et se trouve à l’orée du bois d’Inagot (bois de la Coursière ( ?) sur la carte de Cassini), mais la chute de la voyelle finale est difficilement explicable, on s’attendrait plutôt, dans ce cas, à Serverande/Cerverande.
Des hypothèses supplémentaires donc mais aucune certitude.
Cordialement.

André
Bonjour,
Petite question hors sujet : comment connait-on ces dites "racines" alors qu'il n'en existe, à ma connaissance, aucune trace écrite ? :o
Ce ne serait pas, par hasard, quelque chose comme ces généalogies remontant à Adam et Eve ? :lol:
aviatge
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Bonjour Michel,
Nous n'avons pas de traces écrites de ces racines mais elles sont passées oralement dans des langues plus récentes. Les peuples et les langues bougent, les montagnes et les cours d'eau beaucoup moins.
Les linguistes ont reconstitué des langues souches comme le proto-indo-européen. Lorsque des racines récurrentes, comme KAR en oronymie par exemple, ne peuvent être expliqués par l'étymologie de cette famille mais qu'elles sont communes à d'autres familles linguistiques non apparentées comme l'ouralo-altaïque, les linguistes en déduisent qu'elles ont été empruntées à une langue ou à des langues antérieures. Évidemment la linguistique, comme les sciences humaines en général, n'est pas une science exacte et il y a encore beaucoup de choses à apprendre.
Adam et Ève ne figurent pas (encore) dans ma généalogie ... mais les recherches continuent. :lol:
Cordialement

André
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Bonsoir,
je dispose du dictionnaire celtique ancien de Monard. Il y a certes quelques erreurs, mais il permet de trouver une filiation entre le celtique d'avant le VII° siècle avant JC et le gaulois. Les termes qui y sont regroupés proviennent de l'étude des différentes langues celtiques qui ont perduré, et la comparaison avec des langues telles le Sanscrit, dont en grande partie, est né la langue celtique. Dur à digérer peut-être, mais pour un passionné, c'est une aide importante.
lucien rohou
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aviatge escribió: 23 Julio 2019, 18:53 Bonjour Michel,
Nous n'avons pas de traces écrites de ces racines mais elles sont passées oralement dans des langues plus récentes. Les peuples et les langues bougent, les montagnes et les cours d'eau beaucoup moins.
Les linguistes ont reconstitué des langues souches comme le proto-indo-européen. Lorsque des racines récurrentes, comme KAR en oronymie par exemple, ne peuvent être expliqués par l'étymologie de cette famille mais qu'elles sont communes à d'autres familles linguistiques non apparentées comme l'ouralo-altaïque, les linguistes en déduisent qu'elles ont été empruntées à une langue ou à des langues antérieures. Évidemment la linguistique, comme les sciences humaines en général, n'est pas une science exacte et il y a encore beaucoup de choses à apprendre.
Adam et Ève ne figurent pas (encore) dans ma généalogie ... mais les recherches continuent. :lol:
Cordialement

André
Bonsoir,
Merci pour l'explication "linguistique" (on dit comme cela ?). Si je comprend bien, en fait il s'agit de théories .... :?: :!: :!:
Et comme dans toute théorie, il y a des choses à "améliorer" et d'autres à reconsidérer, voire à rejeter, n'est ce pas ? Et ça peut aller (très) vite !
Comme vous dites : ce n'est pas une science exacte ... :!:

PS . J'emploie le mot théorie au sens où l'entendait Claude BERNARD (Hypothèse, expérimentation, théorie)
Última edición por micgail el 23 Julio 2019, 21:29, editado 1 vez en total.
micgail
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rohou1 escribió: 23 Julio 2019, 20:38 Bonsoir,
je dispose du dictionnaire celtique ancien de Monard. Il y a certes quelques erreurs, mais il permet de trouver une filiation entre le celtique d'avant le VII° siècle avant JC et le gaulois. Les termes qui y sont regroupés proviennent de l'étude des différentes langues celtiques qui ont perduré, et la comparaison avec des langues telles le Sanscrit, dont en grande partie, est né la langue celtique. Dur à digérer peut-être, mais pour un passionné, c'est une aide importante.
Bonsoir,
J'avoue ne pas bien vous suivre ....
Le gaulois, à ma connaissance, était une langue celtique ! Et les gaulois occupaient la Gaule depuis au moins le Vème siècle avant JC.(Les romains les voient apparaitre en Etrurie en 392 avant JC).
Or le celtique étant une langue indo-européenne présente, évidemment, des similitudes avec le sanskrit. Ou ai je "loupé" quelque chose ?
donald11
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Bonjour à tous,

Si je puis me permettre une remarque sur les langues celtiques, le proto-celtique et le gaulois dont je dispose de nombreux dictionnaires (Delamarre, Savignac, Gastal, etc. et éléments grammaticaux).

Tout d'abord : non, les langues celtiques ne descendent pas du sanskrit. Le sanskrit est une langue indo-européenne de la famille des langues indo-aryennes. Le gaulois est une langue celtique de l'embranchement des langues celtiques continental. Un arbre des langues visible ici vous montre bien que les langues celtiques sont aussi proche du sanskrit que le français https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/4/4f/IndoEuropeanTree.svg/1500px-IndoEuropeanTree.svg.png .

Pour en revenir au gaulois, il s'agit d'une langue celtique de l'embranchement des langues celtiques continentales (toutes disparues : le celtibère, le lépontique, etc.). Ne subsistent aujourd'hui que les langues celtiques insulaires que sont :
  • les langues gaéliques : incluant l'irlandais, le gaélique écossais et le mannois ;
    les langues brittoniques : incluant le breton, le gallois, le cornique, etc.
Les langues celtiques descendent du proto-celtique, proche parent du proto-italique, et des proto-langues issues de l'indo-européen commun.

Au sujet du gaulois : le gaulois est une langue au contour mal défini du fait du peu d'attestations écrites. On a aujourd'hui environ 2000 noms gaulois, sans compter les noms propres (prénoms, nom de lieu, etc.). Ces noms sont attestés sur un espace géographique relativement étendu laissant penser que le gaulois était davantage un continuum dialectal (incluant le galate et peut-être le lépontique par exemple) qu'un ensemble homogène (même s'il est difficile de relever des dialectes avec si peu d'attestations).

Le vocabulaire gaulois connu aujourd'hui se décompose ainsi :
  • * d'attestation gauloise en propre : c'est le plus facile : on prend le mot, on en compare le sens avec les mots proches dans les langues celtiques passées ou modernes, avec les langues romanes (occitan, oïl, etc.) existantes, avec l'éventuelle traduction en latin qui l'accompagne, avec les langues baltes, germaniques, indo-iraniennes, etc. (qui, descendant aussi de l'indo-européen commun ont des mots ressemblant) et on obtient sa traduction avec une relative certitude.
    * de gloses en gaulois (parfois déformées) : là ça demande un peu plus d'esprit critique. En effet, le mot "avallo" est attesté dans le glossaire de Vienne, néanmoins les formes existantes aujourd'hui ou par le passé donne "aball" en vieil irlandais, "afall" en gallois, "avalenn" en breton, les noms propres "avallon", etc. Ces termes remontent tous à un proto-celtique *abalnā (l'astérisque signifie que c'est une reconstruction, le "a macron" signifie que la voyelle est longue), lui-même issu de l'indo-européen commun *h₂eph₃ol-n- (notez les h₂, h₃, etc. qui chacun ont donné des voyelles spécifiques dans différentes familles de langues, les consonnes sont plus facilement conservée). Tout cela a permis de déduire que la forme gauloise probable est *aballo- (le tiret final indique que la terminaison finale du mot en gaulois classique est incertaine : on sait que *aballo- était un thème en -o, mais on ne sait pas s'il était masculin (-os) ou neutre (-on).
    * de termes gaulois directement repris en latin (dans ce cas la racine du mot est gauloise, la déclinaison est latine) : là ils sont nombreux : le gaulois et le latin avait beaucoup de similitudes, néanmoins la proximité en apparence des mots ne signifiaient pas que ces termes étaient systématiquement liés voire exact synonymes. Le latin ambactus par exemple était un emprunt fait au gaulois ambactos signifiant serviteur, et qui a donné "ambassade" en français.
    * de reconstructions : les reconstructions sont des estimations faites par des linguistes professionnels. Elles sont de différents degré de certitude (par exemple *aballo- est considéré comme une reconstruction stable) et sont soumis à discussion entre linguistes. Par exemple, le terme pour "nez"/"narine" a été reconstruit à partir du français frogne, froigne « mine renfrognée », le lombard frignare, le vosgien frognon « groin » et du français de Haute-Saône freugnot sous la forme *frogna. Or l'usage du /f/ est un tabou parmi les spécialistes de la langue et beaucoup estiment encore que cette lettre n'était pas présente en gaulois tandis que d'autres estiment qu'elle a pu exister en gaulois tardif. On a donc en concurrence pour l'instant deux reconstructions *frogna et *srogna.
Voila, pour le gaulois. Tout cela pour dire que pour ces langues, mieux vaut se fier aux ouvrages de spécialistes de celles-ci qu'au travaux de personnes dont la spécialité est, par exemple, la toponymie et dont les connaissances ne s'étendent pas nécessairement à toutes les langues qui ont été parlée sur un territoire donné. Le travail d'un spécialiste dans un domaine A dont certains éléments s'étendent sur un domaine B doit toujours être lu avec une source du domaine B pour voir si telle ou telle reconstruction ou attestation est exactement reprise.

Au sujet de cette discussion et de ce hameau, je ne trouve pas le terme "ran" comme mot gaulois dans les dicos de Delamarre, Savignac et Gastal. J'émets donc un doute sur cela. La racine *randa (reconstruction) proposée par aviatge me semble assez pertinente. Le terme est reconstuit
  • * à partir des noms propres en "-rande" : Aigurande, Eyguérande, Iguerande, Ingrande(s)
    * a été traduit par le terme fines en latin (frontière)
    * le terme aurait été utilisé dans le composé *icuoranda, décomposé en *ic(u)o/a- (eau) et *randa (limite)
    * on a en vieil irlandais "rann" (division, part), en gallois rhan "part", en gascon "rendan", en languedocien "rande" et vieux haut allemand "rand", and allemand "Rand" (le Rand allemand a la même racine que le gaulois, donc en fait ces deux points se soutiennent) et en anglo-saxon "rand"
Y a-t-il une rivière par loin ? Y a-t-il une forêt pas loin (ou, y avait-il) ?

Bonne journée,
Última edición por donald11 el 24 Julio 2019, 12:00, editado 1 vez en total.
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Oui, on est sur un bord de vallon creusé par une petite rivière. Le village est cerné par des vallons au sud, est et ouest, l'accès ne se faisant que par le nord historiquement.
Laurène ;)
donald11
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Ok, donc vu que la carte de Cassini donne Servarent, on aurait donc une forme ancienne composée de
  • * "serve" : serve est un synonyme en ancien français de selve lui-même issu de silva (dico d'ancien français de F. Godefroy), comme indiqué ci-avant par rohou1. La carte de Cassini montre bien une forêt (le Bois de la Courière, si je lis bien ?) ;
    * "-rent" : avec notamment la dentale /t/ qui a pu être prononcée (?) pendant un temps à l'origine en alternance avec la dentale /d/ de *randa"
Le tout donnant un toponyme gallo-latin de type *silvă-randa / *siluă-randa (ce deuxième avec un "u" car les notations gauloises préfèrent l'usage du "u" ainsi Vercingetorix est en gaulois Uercingetorix, dont la prononciation reconstruite serait quelque chose comme */wɛr.kiŋ.ge.to.rix/).

C'est une hypothèse mais ça semble cohérent avec la topographie des lieux.

Bonne journée
rohou1
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Effectivement,, je vous rejoins Donald 11. Le dictionnaire celtique de Monard donne aballos signifiant la pomme tout comme Delamarre (dictionnaire de la langue gauloise) donne aballo étant la pomme ou le pommier. Le V du breton aval = pomme est une consonne adoucissante couramment employée dans nos langues si bien que dans la légende de Merlin, on cite Avallon de aval = pomme et lon = plein. Avallon est donc le verger.
J'ai cité ran comme étant une surface nécessaire pour faire vivre une famille. Ran découle aussi de randa, la limite, la lisière. Un ran de ce fait devait être borné ou avait des limites naturelles.
Je pense que nous arrivons à la conclusion que Serverand était un village avec dépendances et terres aux limites bien définies à la lisière d'une forêt.
Bon après midi à tous.
lucien rohou
aviatge
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Bonjour,

Quelques réflexions supplémentaires sur Serverand :
En auvergnat, contrairement à d’autres dialectes plus méridionaux où elles se sont maintenue, la disparition des consonnes finales dans la prononciation est très ancienne, on ne peut donc tirer aucune conclusion des graphies -anc, -and, -ant, -ans, etc. sinon qu’elles correspondaient à une prononciation [an].
Si la forme serve issue de silva est bien attestée en ancien français et confirmée par Godefroy je n’en ai aucune attestation pour le domaine d’oc mais la Combraille est à la limite du domaine...
jacquesciterne escribió: 21 Julio 2019, 23:17 Bonjour,

En patois thiernois, une "serve" était ce qu'on appelle aujourd'hui une "retenue collinaire" mais en plus petit.
C'est à dire un mini-barrage sur un tout petit ruisseau, voire juste une source au creux d'un vallon pour former une grosse mare.
Le rez, reix (je ne sais comment l'orthographier) désigne le sommet.

J'ignore si le patois était le même dans les Combrailles, et si cela pourrait être "la source près du sommet" étant plus imaginatif que qu'étymologiste. ;)
Je n’avais pas retenu le mot serve, présent en auvergnat comme dans tous les parlers d’oc, que je ne connaissais qu’avec le sens de mare car il ne paraissait guère s’appliquer à ce site.
Mais, comme l’a fait très justement remarquer Jacquesciterne ce mot, dont on trouve la racine de même origine dans le français conserve et réserve, peut avoir divers sens : réserve d’eau d’un moulin ; réserve d’eau servant à l’irrigation, par gravité, de prés situés en contrebas ; vivier ; retenue servant au rouissage du chanvre ; etc. Or je connais un site, une étroite bande de terrain plat au bord d’un ruisseau et au bas d’une forte pente, similaire à la parcelle cadastrale 36 du plan de Serverand où, d’après les anciens, l’on rouissait le chanvre.

https://www.geoportail.gouv.fr/donnees/carte-ign

A l’appui de cette hypothèse « réserve d’eau » : au lieudit Besserve (commune de Sauret-Besserve), site comparable a Serverant (toutes proportions gardées, le ruisseau de la Palle n’est pas la Sioule) dont le deuxième élément pourrait avoir la même origine, il y a aujourd’hui un barrage.
Seule une attestation plus ancienne, peut-être en latin, à l’époque ou le sens du toponyme était encore perçu, pourrait nous en apprendre davantage.

Cordialement.
nbernad
nbernad
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Le Littré donne comme définition pour "serve"

1. Terme rural. Mare creusée dans la cour d'une ferme.

2. Réservoir d'irrigation (Dauphiné).

3. Réservoir à poisson, en Auvergne.

Le patois parlé rouergat retient le mot "rande" qu'on peut traduire par fossé, bordure................
Nadine

"Si la vie est éphémère, le fait d'avoir vécu une vie éphémère est un fait éternel. ": Vladimir JANKELEVITCH
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